Interprètes ou messagères du jardinier, «pense-pas-bête» ou clin d’oeil original, les étiquettes – labels en anglais – attirent le regard : à travers elles se manifestent l’exceptionnel, la curiosité mais aussi le plaisir de la collection.
“Les étiquettes, c’est pratique pour retrouver d’une saison l’autre certaines petites plantes récemment installées” : Valérie a beau retenir plus de mille noms de plantes dans son jardin, parfois une étiquette est la bienvenue. “J’utilise souvent l’ardoise, que je trouve jolie, naturelle, et pas trop chère puisque j’en utilise peu”. Avec ces petits panneaux, souvent plantés en terre, impossible d’oublier les noms, les provenances notamment quand on aime les échanges entre amis jardiniers, et d’autres détails importants.
La question devient épineuse quand naît la collection. Les spécimens se multiplient vite, les variations entre plantes sont parfois infimes et on en perdrait son latin…
“L’étiquette doit être lisible, bien calibrée, et elle doit n’offrir qu’une faible prise au vent”, souligne Evelyne Marris-Bessous, attachée à la Roseraie du Val de Marne, située à L’Haÿ-les-Roses (F). Cette collection plus que centenaire, créée en 1899 par Jules Gravereaux et dessinée par Edouard André, compte aujourd’hui plus de 4400 variétés et donc plus de 4400 étiquettes…! “L’étiquetage est indispensable pour conserver l’identité du rosier et mettre en place un espace pérenne, une collection qui puisse servir de référence», poursuit-elle. “Pour nous qui sommes ouvert au public, l’étiquetage est plus complexe que pour un jardin privé. Les superbes étiquettes en porcelaine qui dataient de l’origine du jardin, ont été systématiquement “emportées” par les visiteurs comme souvenir.” Aujourd’hui, elles font partie du “musée” et ont été remplacées par d’autres : “Pendant longtemps nous avons écrit à l’encre de Chine sur des étiquettes en zinc.
Désormais ce sont des étiquettes gravées sur Forex, un matériau plastique indestructible, qui référencient les rosiers.» D’autres étiquettes sur ardoise de Trélazé (écrites au marqueur blanc) différencient les parterres et les familles de roses.
Deux difficultés doivent être bien gérées : l’effacement des informations et la réédition de certaines étiquettes à l’unité. L’effacement peut-être résolu par la gravure : il existe des étiquettes en aluminium que l’on grave soi-même, avec un embout. Et elles peuvent servir partout puisque attachées par deux minces fils de fer torsadés. Le numérotage des plantes, faisant référence à une liste écrite sur papier ou sur fichier informatique est une autre solution. Des entreprises de marquage fournissent de petits médaillons perforés, souvent numérotés, qui seront attachés par une chaînette ou un mince fil : “Cette manière de faire ne peut intéresser que des végétaux arbustifs pouvant supporter un certain poids même faible”, ajoute Evelyne Marris-Bessous. “Le dilemne se pose quand on perd un numéro car il est dispendieux de racheter une seule étiquette. Autre défaut, elles sont peu visibles.”
S’il n’y a pas de collection sans étiquetage, les étiquettes ne suffisent pas à sa bonne gestion : “Se référer à un plan est toujours préférable car la mémoire a ses limites”, précise Evelyne Marris-Bessous, “de même qu’élaborer un fichier botanique qui, d’ailleurs, peut se transférer ensuite aisément sur étiquettes, éventuellement avec des photos.”
La collection, forte de plusieurs dizaines de spécimens, n’est pas l’apanage de tous les jardins. L’étiquette a donc aussi souvent comme rôle de mettre en scène un végétal rare, une composition, voire de signaler une partie du jardin ou d’apporter une inspiration littéraire ou poétique liée au jardin.
Les préférences des pépiniéristes, grands consommateurs d’étiquettes, vont en général aux matériaux plastiques. Mais quand il s’agit de mettre la plante en valeur, ils ont recours de plus en plus souvent aux étiquettes transparentes en Rhodoïd épais, peu chères, sur lesquelles on écrit au marqueur indélébile noir ou blanc. L’étiquette disparaît légèrement au profit de la plante, mais une lecture facile requiert néanmoins un fond le plus uni possible.
L’ardoise – et maintenant sa copie en plastique évidemment moins chère et plus légère -, le PVC et le PEHD, le zinc, l’aluminium, l’acier, le laiton ou le cuivre, le bois ou le bambou…, les matériaux des étiquettes sont devenus très variés. Rien n’empêche non plus le jardinier de les fabriquer soi-même sur un papier épais, écrit à la main ou à l’ordinateur, puis plastifié. L’imagination dans ce domaine est sans limite…